Fleur de CBD légal ou pas : le point sur la réglementation

Rédigé le 16/05/2022

À l’heure actuelle, la vente de fleurs de CBD est autorisée. Ou plutôt, elle n’est pas prohibée. Voyons d’un peu plus près la bataille juridique qui se joue aujourd’hui entre le gouvernement, le conseil constitutionnel, et son impact sur la filière du CBD.

UE : Législation européenne en matière de fleur de CBD

Le 19 novembre 2020, la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) a largement clarifié ses positions dans l’arrêt Kanavape, impliquant la marque d’e-liquides au CBD éponyme, ce CBD étant en provenance de République Tchèque. Rappelant le contexte, le droit français, le droit européen et les modes d’application de la lutte contre le cannabis, la Cour exprime plusieurs grandes idées :

  1. Le CBD n’est pas un produit stupéfiant, contrairement au cannabis contenant du THC

« Dans la mesure où le taux de THC dans le chanvre commercialisé légalement dans les autres États membres est inférieur à 0,3 %, comme c’est le cas dans l’affaire au principal, le CBD ne peut être qualifié de « stupéfiant » »

  1. Le CBD n’est pas dangereux pour ses consommateurs. Le principe de précaution n’est donc pas applicable.

« le CBD […] n’apparaît pas avoir d’effet psychotrope et d’effet nocif sur la santé humaine sur la base des données scientifiques disponibles »

« Une application correcte du principe de précaution présuppose, en premier lieu, l’identification des conséquences potentiellement négatives pour la santé de l’utilisation proposée du produit »

« […] l’évaluation du risque ne peut se fonder sur des considérations purement hypothétiques (arrêt du 28 janvier 2010, Commission/France, C‑333/08, EU:C:2010:44, point 91). »

  1. Enfin, l’interdiction de sa commercialisation constitue une entrave au libre-échange intra européen :

« Une décision d’interdire la commercialisation, qui constitue, d’ailleurs, l’entrave la plus restrictive aux échanges concernant les produits légalement fabriqués et commercialisés dans d’autres États membres, ne saurait être adoptée que si le risque réel allégué pour la santé publique apparaît comme suffisamment établi »

Il est donc interdit d’interdire la vente de fleurs de CBD dans les pays de l’Union Européenne, sauf en démontrant, par des données scientifiques, sa dangerosité sur l’utilisateur ou si le taux de THC de la fleur dépasse le seuil légal de 0,3%.

Évidemment, le cannabis contenant du THC (substance psychoactive aux effets addictifs et néfastes pour la santé) reste interdit. L’arrêté de la CJUE met d’ailleurs l’accent sur la différence entre CBD et THC tout au long du traitement du litige.

Point règlementation fleurs CBD LE LAB SHOP

Fleur de CBD France : une bataille juridique

En 2020, près de 46% des Français avaient déjà consommé du cannabis en France et la moitié d’entre eux seraient favorables à sa dépénalisation. Pourtant, le gouvernement voit d’un très mauvais œil la consommation de weed, qui est finalement loin d’être anodine. Le trafic de stupéfiants et surtout, les accidents de la route entraînent de nombreuses morts et accidents évitables chaque année.

La fleur de CBD est réputée pour ses effets bienfaisants, sans sensation de high ni hallucination, contrairement à la weed. Elle est même utilisée dans le cadre de sevrages cannabiques, car elle partage les mêmes arômes des fleurs de cannabis sativa non légalisées, les effets secondaires en moins, ce qui permet d’opérer une transition toute en douceur jusqu’à l’arrêt complet de la dépendance.

La question se pose alors : vaut-il mieux légaliser le CBD afin de proposer une alternative plus saine au cannabis ou plutôt pénaliser tout ce qui ressemble, de près ou de loin, à une fleur de chanvre indien ?

Arrêté du 30/12/2021 : fleur de CBD interdite ?

Considéré par le gouvernement comme un « cannabis light », le CBD est frappé d’un interdit. Le 31 décembre 2021, le Journal Officiel annonce un nouvel arrêté portant application de l’article R. 5132-86 du code de la santé publique. Celui-ci précise :

« Sont notamment interdites la vente aux consommateurs de fleurs ou de feuilles brutes sous toutes leurs formes », incluant les variétés de Cannabis sativa L. sans THC, donc les fleurs de CBD.

Les raisons invoquées sont principalement :

  • La difficulté pour les forces de l’ordre à différencier fleurs de CBD et fleurs de cannabis, lorsque les agents ne sont pas équipés de détecteurs appropriés
  • L’automédication au CBD sans avis médical, alors même qu’une expérimentation du cannabis thérapeutique est en cours jusqu’à 2023, encadrée par un comité scientifique
  • Les potentiels risques pour la santé des produits à base de cannabinoïdes

Les fleurs de CBD ont donc été classées comme des produits stupéfiants et interdites à la vente en France. Mais alors, pourquoi des cbd shop comme Le Lab Shop continuent-ils d’en vendre encore aujourd’hui ? Sont-ils dans le cadre du droit français ?

Conseil d’État et acteurs du CBD : la filière de chanvriers contre-attaque 

Face à cet arrêté jugé abusif, la filière du chanvre a saisi le Conseil Constitutionnel. À l’heure actuelle, en vertu de la loi européenne et du caractère très hypothétique des risques pour la santé que provoquerait la consommation de fleurs de CBD, le juge des référés a décidé de suspendre l’arrêté du 30/12/2021.

Le vendredi 11 février 2022, le Conseil constitutionnel a estimé que les textes actuels du code pénal étaient bien conformes à la Constitution : les fleurs de CBD peuvent, ou non, être classifiées en tant que stupéfiants. Charge désormais au ministère de la Santé et à l’Agence nationale de Sécurité du Médicament de trancher sur cette classification.

Les mois à venir seront décisifs pour savoir si les fleurs de CBD restent ou non légales en France. Et il est encore possible que l’Union Européenne juge son interdiction abusive, auquel cas le droit européen prévaut sur le droit national.

À l’heure actuelle, dans le cadre règlementaire du 16/05/2022, les fleurs de CBD sont tolérées à la vente et à la consommation, à condition qu’elles ne soient ni fumées, ni commercialisées en tant que produit pharmaceutique.